Salaire raboté, pression: une ex-joueuse de l'OL révèle comment Lyon a géré sa grossesse (VIDÉO)

Sara Björk Gunnarsdóttir révèle notamment ne plus avoir touché intégralement son salaire durant ses mois de grossesse.

Voilà qui brise un peu le mythe ! Alors qu’on voyait l’Olympique Lyonnais comme un club précurseur et très en avance au niveau de son aile féminine (et en soi, ce n’est pas faux), le témoignage sans fard de l’Islandaise Sara Björk Gunnarsdóttir jette un voile sombre sur la façon dont l’OL a géré la grossesse et le retour sur le terrain de cette dernière.

En effet, on apprend dans ce long monologue publié sur The Player’s Tribune que la joueuse qui évolue aujourd’hui à la Juventus n’a tout simplement… pas été payée intégralement durant son congé de maternité, entre avril 2021 et la naissance de son fils en novembre de la même année ! On parle ici d’une somme de 82.000 euros impayés (sur les 109.000 euros dus, elle n’en avait touché que 27.000, selon une décision rendue par le Tribunal de la Fifa) !

Une situation qui a poussé la footballeuse de 32 ans à attaquer son club de l’époque devant les plus hautes instances du football. Une action en justice qui s’est révélée gagnante pour elle. Ce succès devant la Fifa "sonne comme une garantie de sécurité financière pour toutes les joueuses qui veulent avoir un enfant durant leur carrière", a-t-elle réagi.

“This is not ‘just business.’

This is about my rights as a worker, as a woman and as a human being.”

Finally telling my story after I got pregnant in Lyon and the treatment I got while I was pregnant and returning to the pitch!
— Sara Björk (@sarabjork18) January 17, 2023

Une grossesse surprise… et des salaires impayés

Mais alors que s’est-il passé pour que l’OL, référence mondiale en termes d’accompagnement et d’investissements dans le football féminin, se retrouve ainsi sous le feu des critiques ? Flash-back. En mars 2021, la milieu de terrain découvre qu’elle est enceinte. Une grossesse qu’elle annonce forcément au staff et à l’équipe. Dans la foulée, elle explique au club qu’elle souhaite rentrer en Islande pour profiter d’un suivi optimal, dans sa propre langue et entourée de sa famille et de son compagnon. Du côté de Lyon, on ne semble pas réticent à cette idée, au contraire.

C’est là que les choses commencent à mal tourner : "Je n'avais aucune raison de penser que quelque chose irait mal", explique Gunnardóttir sur le média en ligne. "Jusqu'à ce que je ne reçoive pas mon premier salaire. Tout ce qui avait été déposé n'était qu'un petit pourcentage de la sécurité sociale." Étonnant, car les autres joueuses, elles, sont payées normalement.

À Lyon, le directeur sportif assure être raccord avec la loi française. L’agent de la joueuse, lui, affirme que le club doit suivre le règlement de la Fifa, qui impose par exemple aux clubs de proposer un congé maternité "d’au moins quatorze semaines, dont huit après la naissance", rémunéré "au minimum les deux tiers du salaire contractuel". Résultat, Gunnarsdóttir décide de porter l’affaire devant le Tribunal du football de la Fifa, soutenue dans sa démarche par la FIFPRO, le syndicat international des joueuses et joueurs.

Lorsqu’elle annonce son intention d’attaquer, le directeur sportif de l’OL se braque : "Si elle va en justice, Sara n’a pas d’avenir à Lyon." Coup de massue pour la médiane.

Sara Bjork Gunnarsdottir’s landmark ruling against former club Olympique Lyonnais sends a clear message to clubs and footballers worldwide:

The strict application of maternity rights is enforceable.

🔗 https://t.co/SmInzY0xBs pic.twitter.com/aXd4zbazFm
— FIFPRO (@FIFPRO) January 17, 2023

"Nous méritons mieux"

Son retour en France, où elle est toujours sous contrat, après avoir donné naissance à un petit Ragnar ne calme pas les choses. Au contraire, les relations sont plus tendues que jamais avec la direction. Clairement, ce n’est pas à Lyon que sa carrière se poursuivra. Et de fait, quelques mois plus tard, elle signe à la Juventus, quintuple championne d’Italie en titre, alors que son contrat à Lyon a pris fin à l’issue de la saison 2021/2022.

Aujourd’hui, Sara Björk Gunnardóttir a obtenu gain de cause devant la Fifa. Elle a récupéré l’argent qui lui était dû et se dit épanouie dans le Piémont. Surtout, elle s’est exprimée sur ce qui constitue l’un des grands chantiers en matière de développement du football féminin : la garantie pour les joueuses de mener une grossesse sereinement. "Cela fait partie de mes droits et cela ne peut pas m’être contesté, même par un club aussi grand que Lyon", a encore asséné l’Islandaise sur The Players’ Tribune. "Nous méritons mieux."

⚪⚫ ️️ looks good on Sara! 😎 pic.twitter.com/wHornUYxzD
— Juventus Women (@JuventusFCWomen) August 15, 2022

"La Fifa nous reproche aujourd’hui de ne pas avoir proposé un autre travail à Sara Björk Gunnarsdóttir durant son arrêt maladie puis son congé maternité alors qu’en parallèle, la loi nous l’interdit en France et que la joueuse nous avait demandé expressément de pouvoir retourner vivre en Islande, ce que nous avons accepté", s'est de son côté défendu l’OL dans un communiqué. "Nous sommes fiers d’avoir compté Sara Björk Gunnarsdóttir dans l’effectif de l’Olympique Lyonnais. Nos chemins se sont séparés pour des raisons purement sportives."

"On avait montré que l’on avait envie de faire évoluer les choses et de prendre en compte le fait qu’elle était maman au-delà d’être sportive. Malgré tout, cela reste une expérimentation, le cadre n’est pas rigide, on est à l’écoute", a quant à elle expliqué à RMC Sonia Bompastor, la coach du club, elle-même maman de quatre enfants. "C’était nouveau pour le club, au niveau de la direction. (...) Ils ont été à l’écoute par rapport à ça. On a été dans le dialogue et l’échange avec Sara à partir du moment où elle est revenue. Comme c’était une situation nouvelle, il y avait un cadre à mettre en place. Et on voulait qu’elle se sente le mieux possible en tant que maman, pour pouvoir performer sur le sportif. Effectivement, peut-être que tout n’a pas été parfait, car c’était nouveau aussi pour le club", a-t-elle ajouté, précisant également que Gunnarsdóttir n'a pas été retenue au club pour des raisons purement sportives.

Tout ce qu'on espère, c'est qu'Amel Majri, maman depuis peu d'une petite Maryam et de retour sur le terrain ce week-end à l'occasion de la victoire de l'OL à Soyaux, a vécu grossesse un peu plus sereine...